Vaines statistiques
Je viens de
passer la semaine à l'hôtel Reine Élisabeth,
là où il y a 40 ans, Lennon et Ono faisaient leur bed-in. Hélas ce temps-là est
loin, et j'ai assisté plus modestement (péniblement?...) à un meeting de
standardisation.
D'un point
de vue statistique, c’est une expérience plutôt intéressante. Mes
petits camarades forment une population à 99% des hommes (si j’étais en Mode
Shuffle, je serais tombée sans doute là-dessus ). Loin des 10% de présence féminine classique qui sévit tant bien que mal dans
le monde des hautes technologies. Beaucoup ont Junior en fond d'écran
(comprendre "Je voyage beaucoup mais je pense à ma famille"), voire Médor (comprendre "Si j'avais une famille, j'aurais Junior en fond d'écran"),
certains arborent en permanence une oreillette Bluetooth ("Hé Mr l'ingénieur
geek, primo t’es pas en voiture, secundo, NON, l’oreillette Nokia N'est
PAS un bijou qui t’embellit" ).
Beaucoup de
Western (50%), d'Asiatiques (40%), puis des Indiens et des Arabes (10%). UN noir ( !! ça existe comme chanson « où sont les Blacks »? …). Tous full equipped (laptop / cellulaire / tasse en styrofoam). Des PCs surtout,
quelques MAC. Beaucoup de iPhones. Le tout dans des sacoches portés épaule
droite. AUCUNE cravate (…). Des polos et des tee-shirt. Du jean’s (les universitaires) et du
pantalon à pinces (les ceusses de l’industrie, avec un grand I).
On a tous
un bavoir badge autour du cou pour s’ identifer.
C'est le règne du gadget : le pointeur laser qui fait Remote Control pour le PC afin de faire défiler la présentation Pov’Point. Et le festival des adaptateurs électriques (Y a quand même le mot Wireless dans le titre du meeting. Pourquoi suis-je la seule que ça fasse marrer ?).
Puis y a E.T.
Il porte en permanence un masque hygiénique sur le visage (vu de l'Asie, le
Canada n'est pas si loin du Mexique) et c'est le seul qui vide les distributeurs
de savon antibactérien Purell (la seule boite à traverser la crise en faisant des bénéf',
merci les cochons) déployés dans tout l'hôtel en tant que barrage (psychologique
et dérisoire) à la grippe mexicaine porcine A.
Y a ceux
qui, fatigués de leur session et/ou du décalage horaire, dorment sur les canapés.
Des universitaires encore, dont le budget, forcément limité, n'a pas permis de
prendre une chambre dans cet hôtel, dans laquelle ils se reposeraient sinon,
mais dans un hôtel plus cheap et plus loin.
Il y a des
casques audio connectés sur les laptops (« Je cause avec Junior par skype
parce que non seulement je voyage et je pense à ma famille, mais en plus je suis
high-tech » ).
Puis il y a
Robert (en louchant sur le bavoir pour chopper son nom). Le mec qui s’installe à
table avec nous, avec qui je discute et avec qui on découvre qu’on bossait
ensemble loonng tiiiiiiiimmmmmmmme agoooo, quand il était à Nortel Ottawa et
moi Nortel France.
« ‘TAIN,
BOB ?! C’EST TOI ?! »
Je m’en
souvenais très bien. Même si je l'avais jamais vu. Le type qui se présentait toujours avec « My name is
Chengeun (au tout autre nom chinois),
but please, call me Bob ! ». Ah là, là. Quart d’heure philosophique. World
is small et tutti quanti.
Voilà, c’était
mon meeting. Il y avait tout ça.
Pis y avait moi. Qui se demandais ce que je
foutais là et pourquoi je notais toutes ces petites conneries.