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Le Blog de CL
8 septembre 2014

S’il en fallait dix

J’ai fait une pause FB durant quelques semaines. J’avais ainsi évité le Ice Bucket Challenge et pensais même, naïve que j’étais, traverser sans encombres le petit défi littéraire qui sévissait et qui consistait à partager la liste des 10 livres qui « nous ont marqués ». C’était sans compter l’ami, de la catégorie « avec un ami comme ça on n’a pas besoin d’ennemis », qui ce matin a traitreusement immiscé mon nom dans le status dans lequel il dressait sa propre liste – et BAM j’étais foutue. Le reste de la journée, je l’ai passé avec des titres de livres plein la tête, et l’impossible casse-tête d’en extraire 10. Oui, vous avez bien lu, dix. 10 …  Really ?!

 

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De peine et de misère, j’ai dressé le Top 10 ci-dessous, :

 

1. Lettre d’une inconnue, de Stefan Zweig

« Ce n'est que quand je serai morte que tu recevras ce testament, testament d'une femme qui t'a plus aimé que toutes les autres, et que tu n'as jamais reconnue, d'une femme qui n'a cessé de t'attendre et que tu n'as jamais appelée. Peut-être, peut-être m'appelleras-tu, et je te serai infidèle, pour la première fois, puisque, dans ma tombe, je n'entendrai pas ton appel. »

Parce que Zweig. Parce que ses mots d’une incroyable justesse. Parce que son talent d’écrivain qui a su rendre, avec tant de précision et de finesse, les sentiments humains. Parce que Flaubert et son « Madame Bovary, c’est moi » peuvent bien aller se rhabiller, aucun écrivain n’écrira jamais aussi bien les tourments féminins que Zweig dans cette nouvelle. Voilà, c’est dit. Résignez-vous.

 

2. Ce que le jour doit à la nuit, de Yasmina Khadra

« Là où sévissent les hommes, le Seigneur est disqualifié. Ce n'est pas juste de l'accabler des méfaits que nous sommes seuls à rendre possibles. »

Pour la mise en abyme de la schizophrénie de ce livre, écrit par un militaire qui ne voulait pas jouer l’écrivain, qui dans un monde arabo-musulman ose signer sous un pseudonyme féminin, qui raconte les questionnements identitaires d’une Algérie durant la guerre d’indépendance, le tout lu alors que, canadiens depuis quelques années déjà, nous envisagions un retour en terre française. En terminant ce livre, comment le dire autrement, j’ai su que le retour n’était pas au programme.

 

3. Le Petit Prince, de St Exuspéry

[Pas de citations – trop affligeant]

Je le mets dans ma liste pour traumatisme subi. « Le  Petit Prince », c’est mon échec personnel, ma frustration maximum, mon incompréhension perpétuelle. C’est le premier livre de mon parcours de lectrice que je n’ai pas réussi à terminer, exaspérée que j’étais (j’avais 8 ans) de la mièvrerie de l’histoire. Consciente aussi, des années plus tard, de rater un incontournable (whatever that means) de la littérature française (cocorico) et d’ignorer pourquoi.  Je l’ai enfin terminé, à 36 ans, et encore, par simple orgueil, pour le terminer avant ma fille, qui avait à le lire au programme. Je l’ai trouvé encore plus chiant que quand j’en avais 8. Bref, « Le Petit Prince » a été mon premier p’tit con.

 

4. Une prière pour Owen, de John Irving

« John, John, me dit-il. Vous êtes citoyen canadien, mais de quoi parlez-vous toujours ? De l'Amérique. Vous en parlez plus que tous les Américains que je connais. Et vous êtes plus antiaméricain que tous les Canadiens réunis ! Je vous trouve, comment dire ? plutôt monotone sur ce sujet, vous ne trouvez pas?
- Absolument pas.
- John, John, cette colère... Ça n'est pas du tout canadien ça non plus ! »

Je cite Irving, par nostalgie adolescente, période durant laquelle j’ai adoré son écriture mais force est d’admettre que je ne le supporte plus maintenant. Mention Spéciale pour « Une prière pour Owen », pour le sens de la destinée et l’idée que, pour chacun, notre heure viendra un jour.

 

5. La nuit des temps, de Barjavel

« Le silence était comme un buvard dans lequel on avait peur d'entendre les mots s'enfoncer et disparaître. »

C’est Barjavel, qui m’a initiée à la SF et grâce à qui je dois probablement d’être devenue ingénieure. Il y a 4 jours, on nous annonçait la première expérience de télépathie réussie.  Ça m’a fait doucement rigolé. Depuis « La nuit des temps », je croyais que ça existait déjà.

 

6. L’hiver de force, de Réjean Ducharme

« On s’est collés, on s’est serrés. On s’est pressés, fort, plus fort, pour abattre le mur, pour sortir, se déshabiter. Ça n’a pas marché. Ça ne marche jamais. Puis chacun a repris lui-même, chacun a ravalé comme un vomi sa personnalité. »

J’en ai déjà longuement disserté. Rien à rajouter.

 

7. Le roman de la momie, de Théophile Gautier

« Les uns cherchent l'or, les autres la vérité, les deux choses les plus précieuses du monde. »

Le roman qui m’a appris de façon indéniable le pouvoir psychosomatique de la lecture : j'ai fait la lecture improbable de ce roman, qui se passe dans le désert aride égyptien, alors que j’étais en séjour à la montagne pour des sports d’hiver. Je n’ai jamais eu froid et ai frisé souvent l’insolation cet hiver-là. Merci à Gautier pour m’avoir mis un pied dans l’orientalisme avec ce roman, et depuis je demeure irrésistiblement tournée vers le Moyen-Orient grâce à ses dignes successeurs (Maalouf, Khadra, Eberhardt, de Grèce pour ne citer qu'eux).

 

8. Des fleurs pour Algernon, de Daniel Keyes

"Je ne sais donc toujours pas ce qu'est un Q.I. et tout le monde en donne une définition différente. Le mien est d'environ 100 actuellement et il va bientôt dépasser 150 mais il faut encore qu'ils m'emplissent avec quelque chose, comme le verre à mesurer. Je n'ai rien voulu dire mais je ne vois pas, s'ils ne savent pas ce que c'est ni où c'est, comment ils peuvent savoir combien on en a."

Le bouquin qui m’a ouvert l’esprit au concept d’intelligence, sur les moyens de son expression, ses prétentions et les idées souvent fausses et pré-conçues que l'on peut avoir sur le sujet. Et aussi, bien évidemment, sur sa fragilité inhérente.

 

9. Clair de femme, de Romain Gary

« La plus cruelle façon de m'oublier, ce serait de ne plus m'aimer. » 

Car, comme pour Zweig, « parce que Gary ». Pourquoi celui-ci plutôt qu’un autre ? A cause du titre.

 

10.  L’amour est une fête, de Sylvie Bourdon

« J’apprécie les autres à condition qu’ils ne m’envahissent pas. Et il est bon que revienne, au hasard des vents, un flux enivrant de solitude. L’alternance, chère à Montherlant, je la pratique avec une régularité jamais démentie : comme dit l’Ecclésiaste, il est un temps pour aimer, et un temps pour partir » 

Premier livre érotique autobiographique signé d’un vrai nom et non d’un pseudo, sur les amours libertines et décomplexées de Sylvie donc, jeune parisienne dans les années 70 qui aime « ça » et qui en parle fort savamment. Catherine Millet et autres auteurs sans nuance de Grey, tout comme Flaubert, rhabillez-vous.

 

11.        Rien n’est jamais fini, de Maurice Chapelan

« J’écris parce que j’ai tellement le sentiment de n’être personne, que je voudrais bien faire croire aux autres que je suis quelqu’un. »

Voilà un titre qui sied bien au Numéro 11 de ce Top 10. Un livre trouvé par pur hasard chez un bouquiniste de la rue Mont-Royal et acheté sans raison sous une impulsion que je ne me suis jamais expliqué. J’y ai découvert le plume fine et incisive du secrétaire de Grasset, et j’ai parcouru le monde de l’édition parisienne – avec ses traits et ses travers – au travers du regard caustique de celui qui fut aussi chroniqueur au Figaro Littéraire.

 

J’arrête ici cette liste absurde, dans laquelle manquent cruellement les Baricco, Duras, Houellebecq, Maalouf, Dubois, Saucier, Ducharme, Proust, Roy, Milovanoff, Eberhardt, van Cauwelaert, Vargas, Bordage, Scott Card, Simmons, etc… etc… et m’empresse de la poster ce soir, afin de ne plus y revenir et de me libérer de cette insupportable torture. ** soupirs **

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