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Le Blog de CL
19 mars 2009

Dis-moi qui sont ces gens

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J'ai créé une nouvelle catégorie, « Ma vie en mode shuffle »,  pour rapporter de simples saynètes telle que celle ici. Car il m’arrive souvent de drôle de coïncidences, entre ce qui se passe sous mes yeux et la musique qui me traverse, distillée par mon lecteur de mp3 configuré, donc, en mode shuffle.
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Une des grandes différences que j'ai remarquées entre Montréal et Paris est la quasi-absence d’amoureux dans le métro montréalais. Ça m’a toujours étonnée, depuis 10 ans que je vis ici. Comme cela m’enchante, à chaque fois que je retourne à Paris. Je ne peux détacher mes yeux des amoureux du métro parisien.

Et pourtant ce matin, pour contredire ma théorie, je les ai vus. Sur la ligne verte, entre Berri-UQAM et Place-des-Arts. La jeune vingtaine, ils sont assis l’un à coté de l’autre, de dos par rapport à moi. Ils se tiennent les mains, comme accrochés l’un à l’autre. Rien ne compte que l'autre. Ils se dévorent littéralement des yeux.

Dans mes écouteurs, Damien Saez :

        Dis-moi qui sont ces gens
        Qui se montrent indécents
        Qui s'embrassent en public ?


Elle a la main passée dans ses cheveux à lui, elle joue dans ses boucles. Le couvre de baisers délicats sur la joue, descendant le long de sa machoire jusqu'à la base du cou. Puis remonte parfois à l’oreille, où elle lui murmure de doux mots qui les font s’esclaffer de bonheur l’un l’autre en une tendre complicité.

        Dis-moi qui sont ces gens
        Qui rient comme des enfants
        Qui se donnent la réplique ?
        Celle des Roméo,
        Des Tristan, des Rimbaud,
        Celle des grandes musiques.

Station Saint-Laurent. Il jette un œil au dehors pour voir le nom de la station. Puis revient à elle. Je le vois de dos mais le devine soudain sérieux. Il la regarde mieux on dirait, lui encadre délicatement le visage de ses deux mains et l’embrasse avec une nouvelle tendresse. Ils ferment doucement les yeux, quand leurs lèvres se font plus insistantes, tout concentrés en ce baiser qui a des allure d’adieu déchirant. Puis il se lève, comme à regret. Elle lui tient encore la main, ne le lâche pas, le temps que le métro s'arrète et que les portes s’ouvrent.

        Dis-moi qui sont ces gens
        Qui promènent en semant
        La grâce derrière eux ?
        Rendant plus beau le monde
        Qui emportent à la tombe
        Leur amour avec eux.


Quand il descend sur le quai, elle le regarde encore. Elle ne veut rien rater de sa présence à ses cotés. Même éloignés l’un de l’autre, on les sent toujours attachés, liés. Inséparables. Déchirés par cette petite rupture matinale. Les portes se referment et le métro reprend sa course. Lui reste sur le quai, immobile, à la regarder s’éloigner. La scène est attendrissante, touchante d’un romantisme désuet en cette heure de pointe quotidienne.

Je me sens accablée soudain, décalée. Voyeuse de ce bonheur si frais, si neuf. Si éclatant. Je me sens jalouse aussi, vieillie de toutes ces années qui me séparent de ces choses que je faisais, moi aussi, quand je faisais partie de "ces gens", dans le métro parisien.

        Dis, qui sont ces bourreaux
        Qui me tuent sans un mot
        De leurs yeux magnifiques ?



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Commentaires
R
moi chu pas capab' de regarder ce genre de scènes...<br /> Il a raison Saez, ça tue!<br /> tout ce bonheur ça me dégoute...
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