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Le Blog de CL
15 septembre 2008

Mélodies métropolitaines muettes

Un matin de la semaine dernière, sur le quai du métro Laurier, une jeune fille dans la vingtaine, fraîche et rayonnante. Son visage est rond, poupin, et ses grands yeux, noirs, maquillés, regardent alentour avec une curiosité  amusée. Cette fille respire la joie et par ce fait même attire le regard. Elle retire son chandail un peu maladroitement, rit de sa propre gaucherie, prenant à temoin les quelques personnes qui attendent aussi le métro.  Elle est d'une naturel désarmant, joyeux. Quand les portes du métro s'ouvrent, elle laisse très poliment passer devant elle un couple de personnes plus agées, visiblement surpris de cette délicate attention. La jeune fille s'assied et s'attaque à son sac, dont elle sort un recueil de partitions. "Les mélodies" de Gabriel Fauré.  Cette jeune fille est donc une voix. Je dirais instinctivement soprano, ne me demandez pas pourquoi. Assise sur le banc du métro, elle commence à répèter silencieusement ses chants. Un enfant, assis dans une poussette en face d'elle, la regarde fasciné, à qui la belle soprano lance des oeillades et des sourires, entre deux répétitions silencieuses, où seules ses lèvres et son regard s'animent.

Ironie du sort, la belle voix s'est assise dos à dos avec une autre jeune fille. Autant la première rayonne d'une joie qu'on lui sent inhérente, autant l'autre est sombre, agacée déjà, bien tôt en cette matinée d'automne. Elle écoute son Ipod Shuffle et cela l'exaspère. Elle lance des soupirs excédés, semblant elle aussi vouloir nous prendre pour témoins de ses déconvenues musicales. Elle manipule rageusement son minuscule lecteur rose, visiblement contrariée de la sélection musicale aléatoire qu'il distille.

Derrière elle, la voix continue son interprétation muette, avec force mouvements de tête, et la main gauche, celle qui ne tient pas les partitions, qui s'envole parfois. L'autre, l'oreille, prisonnière de son casque, n'entend rien, que sa musique dont on ignore tout mais qui semble visiblement peu propice à adocucir les moeurs.

Dans les 2 cas, je m'amuse à constater que c'est la musique qui mène et qui dirige.

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