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Le Blog de CL
6 novembre 2012

Elle m’a quittée

Nous nous connaissions depuis l'enfance. Nous étions très vite devenues inséparables, quasi indissociables. Jamais loin l'une de l'autre, des âmes sœurs, comme qui dirait. Vous savez, le genre qui vous connait si bien qu'elle termine les phrases que vous commencez.

On avait fini par se ressembler un peu, avec le temps. Quand je parlais d’elle, je disais souvent « C’est moi, en mieux ». Elle était belle, légère. Agréable, la plupart du temps. Cinglante, si jamais je m'énervais. Bien sûr, dans ce genre de relation fusionnelle, les clashs furent nombreux. On s'aimait, mais on se jugeait et on se jaugeait aussi. "Je ne serais jamais assez bien pour toi, de toute façon". Elle avait vraiment le don de m’exaspérer, parfois. 

Ceci dit, je dois l'admettre, même si on ne devrait jamais avoir à dire ça de quelqu'un qui nous est chevillé au corps ainsi, oui, c'est vrai, j'ai quelquefois eu honte d'elle. De la vulgarité qu’elle affichait parfois, aussi soudaine qu’inattendue. D'autres fois aussi, son laisser-aller, son manque de soin et d'élégance. D'autant plus regrettable qu'elle savait être racée et raffinée, quand elle faisait un effort. Mais elle le faisait exprès, en fait. Pour m’énerver.

Elle savait aussi faire rire, il faut lui reconnaitre ça. Toujours la blague facile, pour plaire à mes amis. Pour me les piquer aussi... Moi, pourtant, qui voulais tant qu'ils l'aiment. Allez comprendre.

14-10-09_1744

Lors de ses nombreuses disparitions (elle était ainsi, jamais là quand on avait besoin d’elle, fuyant loin (où ?) sans que l’on sache pourquoi, insaisissable), mes amis me demandaient "Il y a longtemps qu'on ne l’a pas vue, que se passe-t-il ? ". Comme si je le savais ! Alors, bêtement, plutôt que d’avoir à avouer mon ignorance crasse sur les motifs de son départ, les pourquois et les comments de son silence, toujours inexplicable, toujours insupportable, je donnais quelques pauvres excuses, sur le ton de la fille super détachée. "Bah, vous la connaissez. Avec elle, toujours pareil. Ça va, ça vient. Perso, ça fait un moment que je n’ai pas eu de ses nouvelles non plus. A peine deux misérables phrases sur Facebook ... Pas fort, vraiment".

 Puis je devais faire trop pitié, je devais avoir l’air trop perdue et désemparée sans elle, alors mes amis se taisaient. Ou bien plutôt, s’étaient-ils habitués (fatigués?) face à cette relation tordue qu'ils ne comprendraient jamais tout à fait, qu'ils avaient renoncé à comprendre ? Ils répondaient, sur le même air blasé, "Bah, tu sais bien. Elle finit toujours par revenir". La tape dans le dos, le sourire entendu. On passe à un autre appel.

A chacun de ses départs, je mesure la place qu’elle a dans ma vie, elle dont l’absence renvoit dans les cordes mes meilleurs amis. Elle dont le silence me rend l’humanité insupportable. Inaccessible même. Intolérable, surtout.

Je suis même allée "voir quelqu'un", comme on dit pudiquement,  à cause d'elle. Il m’a dit "Vous devez comprendre les racines de cette relation. Vous avez les ressources en vous pour la transformer en quelque chose de sain et d'équilibré bla bla bla". "Mais non, voyons ! Elle me rend folle". Je voulais dire « folle d'elle », mais je n'ai pas pu. D'habitude, c'est elle qui finit mes phrases...

Mais cette fois, elle est partie pour de bon. Comme à chaque fois, je pense la même chose « Ce n’est pas elle, CL, tu sais bien, c’est toi ». Je ne suis pas naïve, vous savez. Qu'ai-je à lui proposer en vérité ? Mes 40 ans bien sonnés, mes CL-ones, Mon Mec de 20 ans. Really ? J'ai même essayé de nous libérer du temps, juste pour nous deux. Qu’on essaye de se retrouver. La bonne blague. Elle qui n'est que volage, départs et retours aériens. Sans attaches.

Donc voilà. Elle est partie.
Et quoi que disent mes amis, cette fois-ci, elle ne reviendra pas.
Marguerite Duras le disait : "Ecrire, c'était ça la seule chose qui peuplait ma vie et qui l'enchantait. Je l'ai fait. L'écriture ne m'a jamais quittée.".

Elle n'a jamais su son bonheur.
Car moi, l'écriture, elle m'a quittée.

 

 

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Commentaires
V
Et ta démonstration a le nez cassé comme disait, je crois, Lorenzaccio, car ce post nous démontre le contraire... ;-)
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